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UN
WEEK-END A LA « REINE DES PAROIS »
Profitant du we du 15 août, je rejoins mes deux
compagnons à la gare centrale de Verviers. Nous quittons celle-ci le mercredi
14 à 18H30, après le boulot.
Notre objectif : les Dolomites et plus
précisément la Civetta surnommée « la Paroi des Parois ».
En effet son
versant nord-ouest est sans égal parmi les parois calcaires des Alpes, il se
développe sur plus de 7 km
de long et près de 1.200 m
de hauteur en son point le plus haut, celui-ci culminant à 3.200 m d’altitude
Pour gravir cette montagne, notre choix s’est
porté sur la voie Aste Armando, une des grandes classiques historiques de la paroi.
Vers 5 heures du matin, les Dols sont en vue et par un long chemin rocailleux nous atteignons enfin un alpage et parking,
qui sera le point de départ vers le refuge Coldai à
2.132 mètres.
Après un petit
déjeuner succinct et un bref repos, nous décidons d’aller reconnaître le point
d’attaque de notre futur itinéraire.
Nous montons à toute allure le sentier qui
nous sépare du refuge, ensuite droit vers une immense brèche dominant le petit
lac de Coldaï et la paroi tant convoitée, brrr… plutôt impressionnante.
Nous longeons le pierrier, et, peu après, nous
repérons deux dièdres parallèles qui se rejoignent à leur base : L’Andrich à
gauche, La Aste à droite.
Bon ben, ce sera pour demain. Nous redescendons au
parking chargeons les sacs, et remontons dans la foulée, en chantant. Ce n’est
pas évident du tout, il faut du souffle...
Nous bivouaquons non loin du refuge… Quatre
heures du matin, le bip bip de ma montre me sort de ma léthargie. Philippe,
Luc, debout c’est l’heure…
Légère collation et vers 6 heures, nous
franchissons le court névé qui barre l’attaque.
Les 150 premiers mètres de
couloir ne posent pas de problème, et celui-ci nous amène au pied de la paroi,
ou fissures, dièdres, dalles se succèdent dont une longueur en cheminée escalade variée.
Tout se passe bien
malgré des passages assez durs et certaines longueurs complètement dingues
qu’importe, nous avons un moral d’acier et le temps est au beau fixe…
Mais nom de D…, le ciel s’assombrit, c’est pas
vrai !!! Si … Il tonne au loin … non ce n’est rien, l’orage va passer à côté.
Des nuages ascendants
filent à une vitesse vertigineuse le long de la paroi, la vallée disparaît de
notre vue, vite vite nous entendons crier Luc « relais », mais trop
tard, la pluie se met à tomber drue, très vite remplacée par de la grêle
accompagnée par des éclairs et le tonnerre …Tout le cirque quoi ! Bordel,
c’est la poisse et plutôt impressionnant.
Luc est à l’abri sous
un grand toit. Philippe et moi complètement trempés sur une étroite vire, c’est
une véritable cascade qui nous tombe dessus canalisé par une grosse fissure
située juste au-dessus de nous et quel gaz !!
Entre-temps, nous avons été rejoint par le
premier d’une cordée italienne qui nous demande de l’aide pour franchir la
longueur suivante devenue quasiment impraticable, et particulièrement
dangereuse le rocher dégoulinant de partout.
Nous attendons impuissants la fin
de l’orage et après quelques manœuvres peu recommandables, nous nous retrouvons
à six échelonnés sous le grand toit, ce qui bien sûr nous a fait perdre
énormément de temps.
Bon gré mal gré nous franchissons la dernière
grosse difficulté 6c dégoulinant qui laisse des souvenirs impérissables et
gravissons la cheminée terminale, dans une semi-obscurité et à la limite de
l’adhérence, mais très vite, nous sommes forcés d’arrêter, n’y voyant plus
rien. Il est 21 heures le bivouac est inévitable.
Epuisés physiquement et moralement on le
serait à moins, les deux Italiens qui se trouvent une longueur en-dessous nous
hurlent avec virulence, qu’il n’est pas possible de passer la nuit dans ces
conditions précaires et qu’il faut illico appeler du secours.
Par l’intermédiaire
de leur premier de cordée plus serein et qui se trouve avec nous, je réponds
que c’est totalement inutile et que personne ne viendra nous chercher ici.
La nuit tombe et devant leur insistance qui
vire à l’affolement, je lance à intervalles réguliers les trois points trois
traits trois points d’usage (SOS) car il n’y a que moi qui possède une
frontale.
Dix minutes plus tard, de la vallée un immense
projecteur nous réplique, bien reçu, on vous a repérés les secours sont prévus
pour demain. Devant l’évidence, ils ont fini par se calmer et subir comme nous
ce fâcheux bivouac de m…
Je vous passe les détails, mais nous allons y
passer 9 heures ½ à quatre sur 1 mètre carré à 3000 mètres d’altitude,
sans boire ni manger, debout pour certains, grelottant et s’efforçant de ne pas
dormir, … oui plutôt atroce, j’en conviens.
Au petit matin, c’est transi de froid et
complètement ankylosés que nous gravissons les deux ultimes longueurs, enfin le
soleil ! Ses rayons nous apportent chaleur et réconfort, mais ce n’est pas
terminé pour autant. Il nous reste 3 heures de descente par la via Ferrata.
C’est vers 11 heures que nous rejoignons le
refuge, fourbus et déshydratés ou nous sommes accueillis par un comité de
réception (pour avoir mis en branle les secours pour rien en somme et notamment
un hélico basé à Cortina d’Ampezzo, la note
salée, je suppose ? fut présentée à juste titre, à nos sympathiques
compagnons d’infortune)
Après s’être désaltérés copieusement, c’est une
nouvelle fois sous l’orage que nous redescendons au parking. Environ 32 heures
non-stop et la Belgique est encore à plus de 1000km…
Le surlendemain au
boulot, les copains nous demandent et alors ce W.E. ? SUPER !!!
PUNTA
CIVETTA 2.920 m
Paroi nord-ouest
Voie ASTE
- SUSATTI Le
26, 27 et 28 juillet 1954
Difficulté : ED
Très belle escalade
se déroulant totalement à l’ombre et malgré quelques passages de rochers peu
solides.
Les difficultés sont
concentrées dans les derniers 450 mètres.
Le passage clé se
passe en libre 6c pour le reste ensemble
de 4c- 5a- 5b- 5c - 6c et A0.
Participants :
Luc MAGERMANS- Philippe SIMON- Jean-Claude VITTOZ - 1985
Matèriel :
Il est prudent d’emporter un jeu de coinceurs du n° 1 au 8 et un choix de pitons toujours utiles car nous sommes tombés sur deux relais non équipés (1985) et dans l’impossibilité de placer des coinceurs.
Le casque est bien entendu recommandé.
D’autre part, il est préférable de parcourir cette voie en cordée de deux.
Descente :
En versant Est, par
la facile Via Ferrata degli Alleghesi:
TOPO :
Beaux clichés de Philippe Brass qui reflètent bien l’ambiance de la
voie en 2015
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Bibliographie:
Les Dolomites
Orientales de GINO BUSCAINI aux éditions DENOEL.
« La précarité est inhérente à notre activité
d’alpinistes » Gino BUSCAINI.
Que nous sommes petits au pied de la
montagne
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