L'AVENIR DU MARDI 5 JUIN 2018
Accidents d'escalade: «On aseptise les parois, c’est ça le danger»
https://www.lavenir.net/cnt/dmf20180604_01180009/on-aseptise-les-parois-c-est-ca-le-danger
Ouvreur
de plus de 400 voies en Belgique cet alpiniste chevronné prévient: la manière
dont on gère les parois va multiplier les accidents.
Alain
WOLWERTS
Les
deux accidents d'escalade survenus à Houffalize et Modave ces dix derniers
jours font réagir Jean-Claude Vittoz.
A 71
ans, l'homme est un alpiniste chevronné qui ne se prive pas de donner son avis quand quelque chose ne lui
plait pas dans le milieu des grimpeurs. Ce qui le fait parfois passer chez
certains pour un donneur de leçons façon vieille école.
Le
Liègeois convient qu'il n'a pas sa langue en poche, ce qui lui vaut d'être en
conflit avec certains, notamment au Club Alpin Belge.
Mais
avec derrière lui plus de 50 ans d'alpinisme et plus de 440 itinéraires ouverts
et équipés par ses soins sur les massifs rocheux de Belgique, on peut sans
doute entendre son avis.
Le nombre d'accidents va augmenter
Or
celui-ci est plutôt alarmiste: Cet "accident" un de plus ne m'étonne
nullement et l'on se dirige malheureusement vers une augmentation du phénomène
suite à LA BANALISATION de
notre sport" dit-il en évoquant l'accident au rocher Régissa à Modave où
un jeune flamand a été gravement blessé dans une chute le 27 mai.
Le
rocher de régissa Jean-Claude Vittoz le connaît particulièrement bien puisqu'il
en a été le gestionnaire pendant 18 ans et en a ouvert la grande majorité des
voies.
Mais
là, comme beaucoup de parois en Belgique, on a suréquipé le site dit-il "
On à mis des broches à la colle chimique tous les deux ou trois mètres, ce qui
fait que la personne n'a plus conscience du risque. C'est de l'escalade
planifiée alors que quand c'est de l'escalade montagnarde, le grimpeur va
prendre beaucoup plus de précautions"
Autre
problème selon lui, le recours intempestif de la "moulinette"
Technique issue de l'escalade en salle, elle consiste à être assuré depuis le
point haut.
Mais
on met des relais moulinettes partout. Et quand le grimpeur arrive à un relais
il doit s'accrocher et se désencorder. A la moindre gaffe, c'est la
chute…"
Et
de citer l'exemple des rochers de Fidevoye, à Yvoir, où une des voie comptait
jadis 8 pitons, relais compris mais
compte aujourd'hui 17 broches "
Peut-on encore considérer que c'est de l'escalade ? "
Aujourd'hui " la grimpe connaît un succès croissant
en Belgique. Pour Jean-Claude Vittoz, il ne s'agit pas de casser cet
engouement. Mais pour une meilleure sécurité, il prône le modèle à la
française: une classification des sites allant de "sportif" à " terrain d'aventure" afin de laisser libre des sites pour la
pratique de l'escalade traditionnelle et sur lesquels les grimpeurs pourraient
apprendre des techniques et une gestion mentale qu'il n'est plus possible d'acquérir
juge Jean-Claude Vittoz, sur " des sites aseptisés".